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8 février 2014 6 08 /02 /février /2014 21:36

 Le Présent éternel (6/7)

(L'Être pur est dans le présent éternel)

 

 

Jean-Pierre de Caussage, L'Abandon à la Providence divine, éd. Desclée De Brouwer, 1966, collection Christus n° 22, chap. IX : De l'excellence de la volonté de Dieu et du moment présent :

 

           " [...] L'action divine exécute dans la suite des temps les idées que la Sagesse a formées de toutes choses. Tout a en Dieu ses propres idées, cette seule Sagesse les connaît ; quand vous connaîtriez toutes celles qui ne sont pas pour vous, cette connaissance ne pourrait vous diriger en rien. L'action divine voit dans le Verbe l'idée sur laquelle vous devez être formé, c'est l'exemplaire qui lui est proposé. Elle voit dans le Verbe tout ce qui est convenable pour toutes les âmes saintes. L'Écriture Sainte en comprend une partie, et les ouvrages que l'Esprit Saint forme dans l'intérieur achève le reste sur les exemplaires que le Verbe lui propose. Ne voit-on pas que l'unique secret de recevoir le caractère de cette idée éternelle, est d'être un sujet souple en ses mains ; que les (efforts), les spéculations de l'esprit ne peuvent rien faire (à) cela ; que cet ouvrage ne se fait point par voie d'adresse, d'intelligence, de subtilité d'esprit, mais par voie passive d'abandon à recevoir, à se prêter, comme le métal dans un moule, comme une toile sous le pinceau ou une pierre sous la main du sculpteur ; ne voit-on pas que la connaissance de tous ces mystères divins que la volonté de Dieu opère et opérera dans tous les siècles, n'est point ce qui fait que cette volonté nous rend conforme à l'image que le Verbe a conçue de nous ? que c'est ce cachet ou l'impression de ce cachet mystérieux ; et que cette impression ne se fait pas dans l'esprit par des idées, mais dans (la volonté) par abandon."

 

Saint François de Sales (évêque et Docteur de l'Église), Traité de l'Amour de Dieu, livre VI, chapitre XV :

 

           "Une imagination puissante fait blanchir un homme en une nuit, détraque sa santé et toutes ses humeurs. [...] Les brebis de Laban, échauffées d'amour, eurent l'imagination si forte qu'elle porta coup sur les petits agnelets desquels elles étaient pleines, pour les faire blancs et tachetés, selon les baguettes qu'elles regardèrent dans les canaux où on les abreuvait (1) [...] hé, combien fut extrême l'attendrissement du grand saint François [d'Assise], quand il vit l'image de Notre-Seigneur se sacrifiant soi-même sur la croix ! [...] L'amour donc fit passer les tourments intérieurs de ce grand amant saint François jusqu'à l'extérieur, et blessa le corps d'un même dard de douleur duquel il avait blessé le cœur." 

           1) Cf. Genèse, XXX, 38-39.

 

Saint Jean de la Croix, Docteur de l'Église, La Nuit obscure, livre II, chapitre III :

 

           "[...] toutes les imperfections et les désordres de la partie sensitive ont leur force et leur racine en l'esprit, où sont subjectées toutes les habitudes bonnes et mauvaises, et ainsi jusqu'à ce que celles-ci soient purgées, les rébellions et les vices du sens ne se peuvent bien purger" : [...] todas las imperfecciones y desordenes de la parte sensitiva tienen su fuerza y raiz en el espiritu, donde se sujetan todos los habitos buenos y malos, y asi, hasta que estos se purgan, las rebeliones y siniestrios del sentido no se pueden bien purgan."

 

S. Jean, VI, 63 :

 

           "C'est l'esprit qui vivifie ; la chair ne sert de rien." 

 

Maître Eckhart, Traités et Sermons, traduction, introduction, notes et index par Alain de Libera, publié avec le concours du Centre national des Lettres, GF-Flammarion, Paris, 1993, Sermon n° 2 : Il est dans l'âme un château fort où même le regard du Dieu en trois Personnes ne peut pénétrer (Lc 10, 38 : Intravit Jesus in quoddam castellum et mulier quaedam excepit illum, etc. ) - dans la mesure où Dieu agit selon le mode et la propriété de ses Personnes et où l'on se trouve dans le fond essentiel de l'âme ou dans une profondeur qui précède la division de l'âme en ses puissances et activités distinctes, là où Dieu est un Un simple et absolu [cela est peut-être difficile à comprendre, mais cela est vrai, car ce lieu existe et peut être réalisé avec la grâce de Dieu], pp. 233, 234, 235 :

 

           "Je l'ai déjà dit souvent aussi : il est dans l'âme une puissance qui n'est touchée ni par le temps, ni par la chair, qui émane de l'esprit et reste dans l'esprit et est absolument spirituelle. Dans cette puissance, Dieu se trouve totalement, Il y verdoie et fleurit dans toute la joie et toute la gloire qu'Il est en Lui-même. Cette joie est tellement du cœur, elle est d'une grandeur si inconcevable, que nul ne saurait l'exprimer pleinement avec des mots. Car le Père éternel engendre sans cesse son Fils éternel dans cette puissance, en sorte que cette puissance collabore à l'engendrement du Fils et d'elle-même en tant que ce Fils, dans l'unique puissance du Père. [...] ... dans cette puissance, Dieu est comme dans l'instant éternel. Si en tout temps, l'esprit était uni à Dieu dans cette puissance [dans une mort totale à soi ou dans une pauvreté absolue], l'homme ne pourrait pas vieillir, car l'instant où Dieu fit le premier homme, l'instant où le dernier homme disparaîtra, et l'instant où je parle, sont égaux en Dieu : ils n'y sont qu'un seul et même instant. Or, voyez ! cet homme demeure dans une seule et même lumière avec Dieu : c'est pourquoi il n'y a en lui ni souffrance ni succession, mais une même éternité. [...] La même puissance dont j'ai parlé, cette puissance où Dieu fleurit et verdoie avec toute sa Déité et où l'esprit (fleurit) en Dieu, dans cette même Puissance le Père engendre son Fils unique aussi véritablement qu'en Lui-même, parce qu'Il vit vraiment dans cette Puissance ; et l'esprit engendre avec le Père le même Fils unique et il s'engendre lui-même comme le même Fils, et il est le même Fils dans cette lumière et il est la vérité. Si vous pouvez saisir cela avec mon cœur, vous comprendriez bien ce que je dis, car c'est vrai, et c'est la Vérité qui le dit elle-même."

Nécessité de l'oraison

 

Sainte Thérèse d'Avila (ou sainte Thérèse de Jésus), Docteur de l'Église, Le Château de l'âme ou Le Livre des Demeures, Ires Demeures, chap. Ier :

 

           " Les âmes qui ne font pas oraison, me disait, il y a peu de temps, un grand théologien, sont comme un corps paralysé ou perclus, qui a des pieds et des mains, mais qui ne peut s'en servir. Certaines âmes, en effet, sont tellement infirmes et tellement habituées à ne s'occuper que des choses extérieures, qu'on ne saurait les en tirer et qu'elles semblent dans l'impuissance de rentrer en elles-mêmes. Elles ont déjà contracté une telle habitude de vivre au milieu des reptiles et des bêtes qui se trouvent autour du château [de l'âme] qu'elles en ont pris, pour ainsi dire, la ressemblance. Malgré la noblesse de leur nature et le pouvoir qu'elles avaient de converser avec Dieu Lui-même, elles ne sont point sorties de cet état. Si elles ne s'appliquent pas à reconnaître combien profonde est leur misère et à y porter remède, si, de plus, elles ne portent pas leurs regards sur elles-mêmes, elles seront changées en statue de sel, comme la femme de Lot, qui avait regardé en arrière (1)."

           1 - Cf. Genèse, XIX, 20.

 

L'oraison de recueillement

Saint Jean de la Croix

Le Docteur Mystique

 

La Montée du Mont Carmel, livre III, chapitre XXXIX :

 

           " Pour acheminer l'esprit à Dieu en ce genre, il faut remarquer qu'on permet bien à ceux qui commencent - et même qu'il leur est expédient - d'avoir quelque goût et suc sensible, touchant les images, oratoires et autres choses dévotes visibles, pour autant qu'ils ne sont pas sevrés ni n'ont le palais détaché des choses du monde, afin que ce goût leur fasse perdre l'autre. Comme quand on veut tirer quelque choses des mains d'un enfant, on lui en donne une autre, de peur qu'il ne pleure, se voyant les mains vides. Mais le spirituel qui veut s'avancer, se doit dénuer aussi de tous ces goûts et appétits où la volonté se peut réjouir ; car le pur esprit ne s'attache guère à aucun de ces objets, mais il demeure tout en une retraite intérieure et conversation mentale avec Dieu. Que s'il se sert des images et oratoires, ce n'est qu'en passant, et aussitôt son esprit s'arrête en Dieu, oubliant tout en sensible.

           " Partant, encore qu'il vaille mieux de prier au lieu le plus décent, néanmoins il faut malgré cela choisir celui où le sens et l'esprit sont moins empêchés d'aller à Dieu. En quoi il faut que nous nous servions de la réponse que Notre Sauveur fit à la Samaritaine, sur la demande qu'elle Lui fit, à savoir quel était le lieu le mieux accommodé pour prier, le temple ou la montagne : que la vraie oraison n'était point attachée à la montagne ni au temple ; mais que ceux qui plaisent au Père en leurs adorations sont ' ceux qui L'adorent en esprit et en vérité ' (S. Jean, IV, 23-24). Partant, encore que les églises et les lieux agréables soient dédiés et accommodés à l'oraison (car on ne doit user des églises pour autre sujet), néanmoins, pour un négoce (trad. de l'esp. : "negocio", affaire, occupation, emploi, travail) tant intérieur que celui-ci, qui se fait avec Dieu, il faut choisir le lieu qui occupe et qui attire moins le sens après soi. Ainsi, ce ne doit pas être un lieu plaisant et agréable au sens (comme quelques-uns recherchent) de peur qu'au lieu de recueillir l'esprit en Dieu, il ne s'arrête en la récréation (au délassement : recreación), au goût et en la saveur du sens. Et pour cette cause, un lieu solitaire et même âpres est bon, afin que l'esprit monte solidement et directement à Dieu sans être empêché ni retenu en les choses visibles ; encore qu'elles aident parfois à élever l'esprit, mais c'est en les oubliant tout aussitôt et s'arrêtant à Dieu. C'est pourquoi Notre Sauveur (pour nous donner exemple) choisissait des lieux déserts pour prier et ceux qui n'occupaient guère les sens ; mais qui élevassent l'âme à Dieu, comme étaient les montagnes qui sont élevées sur la terre et sont arides d'ordinaire, sans aucune matière de récréation sensible.

           " D'où vient que le vrai spirituel ne s'attache, ni ne regarde si le lieu pour prier est de telle ou telle commodité - parce que cela est encore être attaché au sens - mais il ne regarde qu'au recueillement intérieur, oubliant ceci et cela, choisissant pour cet effet le lieu le plus exempt d'objets et de sucs sensibles, n'ayant aucun égard à tout cela, pour pouvoir mieux jouir de son Dieu en la solitude des créatures. Et c'est une chose remarquable de voir des spirituels qui emploient tout leur temps à dresser des oratoires et accommoder des lieux agréables conformément à leur humeur ou inclination ; et du recueillement intérieur, qui est le plus important, c'est ce dont ils font moins de cas et dont ils ont le moins ; parce que, s'ils en avaient, ils ne pourraient se plaire à ces façons et manières qui, au contraire, les lasseraient [c'est le test !]. "

 

Ibid., chapitre XL :

 

           " La cause donc pour laquelle certains spirituels n'achèvent jamais d'entrer en les vrais joies de l'esprit, c'est parce qu'ils ne viennent jamais à bout de séquestrer leur appétit de la joie de ces choses extérieures et visibles. Que ceux-là sachent qu'encore que le lieu décent et dédié à l'oraison soit l'église et l'oratoire visible - et l'image comme motif - néanmoins ce ne doit pas être en sorte que le suc et la saveur de l'âme s'emploient au temple visible et au motif, et qu'elle s'oublie [trad. de l'esp. : se olvide] de prier au temple vif, qui est le recueillement intérieur de l'âme. L'Apôtre nous avertissant de cela dit : ' Regardez, car vos corps sont les temples vivants de l'Esprit-Saint qui habite en vous ' (I Corinthiens, III, 16). Nous entrons en cette considération par l'autorité du Christ préalléguée [trad. de l’esp. : y a esta consideración nos envía la autoridad que habemos alegado de Cristo], à savoir que ' ceux qui L'adorent vraiment doivent L'adorer en esprit et en vérité ' (S. Jean, IV, 24). Car Dieu tient fort peu de compte de vos oratoires et de vos lieux parés, si, pour y être attaché de l'appétit et du goût, vous avez un peu moins de nudité intérieure (esp. : desnudez interior) - qui est la pauvreté spirituelle dans l'abnégation de toutes les choses que vous pourrez posséder [cf. S. Luc, VI, 20b ; S. Matthieu, V, 3].

           " Donc, pour purger la volonté de la joie et du vain appétit en cela et l'adresser à Dieu en votre oraison, regardez seulement que votre conscience soit pure et votre volonté entière avec Dieu et la pensée véritablement fichée en Lui [cf. S. Matthieu, V, 8] ; et (comme j'ai dit) il faut choisir le lieu le plus écarté et le plus solitaire que vous pourrez, et convertir toute la joie de votre volonté à invoquer et glorifier Dieu, sans faire cas de ces autres petits goûts de l'extérieur [les renardeaux : C.S., XXVI, 1], au contraire, il faut tâcher à y renoncer. Que si l'âme commence à se laisser aller à la saveur de la dévotion sensible, elle n'arrivera jamais à la force des délices spirituelles qui se trouvent en la nudité de l'esprit moyennant le recueillement intérieur. "

 

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L'ACTE D'ÊTRE OU D'EXISTER

 

              

L'acte est ce qui donne à l'être son ultime signification : il est la fin de l'être. Le bien, quant à lui, est l'être désirable, l'être qui attire et meut la cause efficiente, parce que tout être, pour autant qu'il est, est bon - bon ontologiquement et non pas moralement, parce que le bien moral n'est qu'un cas particulier du bien ontologique, un bien dans l'ordre de l'accomplissement de l'être humain, ou dans l'ordre particulier de la nature et de l'existence humaines (1). L'être et le bien sont convertibles, mais l'être est le principe du bien, parce que rien ne peut exister en dehors et au-delà de lui : " tout être est ou n'est pas " (2). L'être précède donc le bien. Le bien, le bien ontologique, est une propriété transcendantale de l'être, une propriété qui convient à tout l'être sans rien lui ajouter. Il est donc relatif à l'être.

           Seule la compréhension de l'acte et de la puissance nous permet de découvrir l'être comme acte et la finalité au niveau de l'être jusqu'à son ultime précision métaphysique. Pour cela, il convient de saisir la causalité finale comme telle, de la saisir en elle-même, c'est-à-dire dans son exercice parfait, pur et ultime, et non de la saisir dans son effet immédiat et immanent, dans un état inachevé ou en devenir, ce qui aurait immanquablement pour résultat de la lier à l'œuvre propre de la causalité efficiente, au point de la réduire ou de la ramener à celle-ci et de confondre pratiquement ces deux causalités.

           La cause finale a la priorité ou le pas sur toutes les causes. Elle est supérieure à l'effet : elle est la cause des causes. Elle est par conséquent la cause de la cause efficiente, la cause de l'efficience de la cause efficiente, parce que celle-ci n'opère que pour atteindre sa fin, comme la santé est la raison pour laquelle le médecin agit (3).

           La fin est la cause première et la raison d'être du mouvement : tout devenir est suspendu à sa cause finale. Sans finalité rien n'inclinerait à se diriger dans un sens plutôt que dans un autre. Tout être qui tend vers une fin est également mis en mouvement par celle-ci en étant attiré par elle. Seul ce qui est réel peut mouvoir : " l'agir suit l'être en acte " (4), car " rien ne peut être amené à l'acte que par un être en acte " (5). Donc un être ne peut réaliser sa fin ou parvenir à sa forme parfaite ou à son entéléchie (6) que si cette forme possède déjà une certaine réalité : ce qui n'est pas réel ne saurait agir.

On peut par conséquent soutenir que toutes les formes finales, idées ou archétypes, existent dans l'Esprit divin, comme la représentation d'une maison est dans l'esprit de l'architecte (7), et l'on peut même soutenir qu'elles possèdent un être plus authentique que celui qu'elles ont en elles-mêmes, parce que la connaissance de l'Etre premier est véritablement créatrice et que toute Idée, en Celui-ci, qui est l'Acte pur d'exister et le Principe opérant, n'est pas autre chose que son essence ou son être même (8), archétypes dont la causalité s'identifie à l'action créatrice, alors que la représentation d'une maison qui existe dans l'esprit de l'architecte n'a pas un être plus authentique que celui que la maison aura une fois construite (9).

           Pour l'homme, avant d'entrer dans l'unité divine, il s'agit d'abord de parvenir à son entéléchie ou à la pure et parfaite image de son archétype ou de son essence incréée, c'est-à-dire de rejoindre sa propre réalité essentielle in divinis et de la posséder en montant au-dessus de toutes choses et en plongeant dans l’abîme de son néant pour réaliser la plénitude du Christ en qui réside le type de toutes les créatures (10).

           Le siège et le rôle de l'archétype nous permettent de soutenir qu'il existe un lien très particulier, un lien intime et permanent, entre chaque substance créée et son archétype. Aristote, en s'opposant radicalement à la doctrine des Idées de Platon, n'a pas pour autant mieux expliqué que son maître le développement qui conduit tout nouvel être vivant à son aboutissement ou à sa forme adulte. En effet, la cause, selon l'achèvement parfait, d'un enfant n'est ni son père, ni l'embryon, ni l'être en tant que tel, parce que celui-ci est au-delà de toute forme, que celui-là n'est pas un être achevé et parce que le fils n'est pas dans la dépendance ontologique, actuelle ou continuelle, de son père (11). L'Idée platonicienne n'est tenue par rien, flottant dans l'espace comme une chimère, et celle d'Aristote reste paradoxalement liée à la matière : il n'y a aucun lien ontologique et tout à la fois transcendantal entre leur Idée et leur substance correspondante (12). Les idées de création, de développement et de conservation dans l'être les auraient sans doute aidés à sortir de leur impasse, mais ils en étaient bien trop éloignés (13). S. Denys l'Aréopagite, le converti et le disciple de saint Paul (14), le Docteur athénien qui permit à S. Thomas d'Aquin de devenir " le grand astre de la théologie " (15), est le premier penseur chrétien qui a vu clairement l'impasse à laquelle conduisaient les théories de Platon et d'Aristote sur les Idées et qui a trouvé le moyen d'en sortir en plaçant leurs Idées dans l'Esprit divin (16), afin de les rendre opérantes en tant que " raisons créatrices des choses " (17) et par conséquent en tant que causes finales du développement de leur forme créée correspondante.

           Cela dit, ne perdons jamais de vue que bien que Dieu, l'Acte pur, l'Etre premier ou l'Etre même, soit sans limite et qu'il n'ait par conséquent aucune forme particulière, parce que toute forme le limiterait, il peut cependant prendre une forme appropriée pour se conformer à l'âme commençante ou immature encore incapable de l'adorer sans le voir tel qu'il est (18), Dieu s'accommodant ainsi à la faiblesse de sa créature ou la traitant selon son mode et son état de peur qu'elle n'aille que de mal en pis et ne soit plus capable de progresser. Dieu est au-delà de toutes nos idées et de toutes les formes, au-delà de tout ce que l'homme peut comprendre, voir ou imaginer (19), mais il se met toujours à la portée de l'âme qui se tourne simplement et sincèrement vers lui en lui donnant d'abord ce qu'elle est capable d'assimiler, en attendant de lui donner des choses meilleures, car il va perfectionnant l'homme à la manière de l'homme, du plus bas et extérieur jusqu'au plus haut et intérieur, disposant toutes choses suavement et les mouvant à leur mode, précise S. Jean de la Croix, le Docteur Mystique, dans sa Montée du Mont Carmel (20). A quoi servirait-il en effet de marteler et de tyranniser une âme et de lui ôter par là sa liberté pour la contraindre à prendre le chemin que l'on a choisi à sa place, même dans le but de la gagner à la bonne cause, ou à la cause de Dieu ? (21) Serait-ce le travail de Dieu ou de l'homme, voire de l'esprit malin ? En vérité, en agissant ainsi, on ne ferait que fausser ou déformer monstrueusement cette âme. C'est l'Œuvre de Dieu qui doit s'accomplir, et non l'œuvre de l'homme. Ne sait-on pas qu'il y a plusieurs demeures dans la maison du Père (22) et, avec S. Jean de la Croix, qu' il ne se trouve qu'à grand'peine un esprit qui convienne avec la façon d'un autre en la moitié de sa propre façon ? (23) ". Dieu est Lumière et Amour (24) : sa sagesse et sa compassion sont infinies. Ne nous faisons pas d'illusions : nous n'aiderons véritablement notre prochain qu'en acceptant de nous laisser conduire par l'Esprit qui vient de Dieu et ne demande qu'à allumer dans notre cœur et celui de notre prochain le feu de son incomparable amour. En vérité, Dieu n'attend de nous que notre docilité et notre oui d'amour (25).

 

1) Cf. S. Thomas d'Aquin, Somme théologique, I-II, qu. 18, a. 1 et 2, et q. 19, a. 7, dif. et sol. 3.

 

2) Il n'y a pas de troisième position : c'est le principe du tiers-exclu (tertium non datur).

 

3) S. Thomas d'Aquin, Les Principes de la réalité naturelle, chap. IV, § 19.

 

4) S. Thomas d'Aquin, Contra Gentiles, liv. IIIe, chap. 69 : " Item. Si agere sequitur ad esse in actu ".

 

5) Ibid., I, q. 2, a. 3, c.

 

6) Entéléchie, du grec enteleceia, de en, dedans, telos, achèvement, accomplissement, résultat, but, fin, et de ecw, avoir, porter, atteindre. Etat final de perfection, état de l'archétype, de la forme-type, de la forme exemplaire. Archétype, du grec arcetupon, de arch, principe, origine, et de tupos, empreinte, forme. (Cf. Aristote, Métaphysique, liv. Thêta, cc. 6 et 8, et liv. Dzéta, c. 9, 1034 b 10-20.)

 

Platon, Timée, 90 b :

"  [...] que celui qui contemple se rende semblable à ce qu'il contemple en conformité avec sa nature originale (arcaian fusin) et que, s'étant rendu ainsi pareil à elle, il atteigne (ecein) pour le présent et pour l'avenir, l'achèvement parfait (telos) de la vie que les Dieux ont proposé aux hommes. "

 

7) Cf. S. Thomas d'Aquin, Somme théologique, I, q. 15, a. 1, concl. - Ibid., q. 44, a. 3, concl. :

 

«  Il faut donc dire que dans la divine sagesse sont contenues ces notions de toutes choses, que plus haut nous avons appelées Idées, entendant par là des formes-types, existant dans l'intelligence divine. Du reste, ces Idées, bien qu'elles soient multiples en tant qu'elles se réfèrent aux choses, ne sont réellement rien d'autre que l'essence divine, selon que sa ressemblance peut être participée diversement par les divers êtres. »

 

Id., I, q. 80, a. 1, concl. :

 

"  [...] Dieu, 'en qui toutes choses préexistent', selon ce qui dit Denys " ( Des Noms divins, chapitre V). "

 

Id., I, q. 44, a. 3, cependant :

 

" Cependant, ce qu'on appelle exemplaire est identique à ce qu'on appelle Idée. Or, d'après saint Augustin, les Idées sont des formes-principes contenues dans l'intelligence divine. Les exemplaires des choses ne sont donc pas hors de Dieu. "

 

Id., I, q. 15, a. 1, sol. 1 :

 

" Il est certain que Dieu ne conçoit pas les choses au moyen d'une idée existant hors de lui-même. "

 

Id., I, q. 15, a. 2, concl. :

 

"  [...] on ne peut concevoir un tout sans avoir la conception précise des éléments qui constituent ce tout [...] Or, il n'est pas contraire à la simplicité de l'intelligence divine qu'elle conçoive beaucoup de choses, mais seulement que plusieurs formes intellectuelles prétendent déterminer cette intelligence divine. [...] Dieu connaît parfaitement son essence ; il la connaît donc sous tous les aspects qu'elle offre à la connaissance. Or cette essence peut être connue non seulement quant à son existence propre, mais selon qu'elle est susceptible de participation en manière de ressemblance par les créatures. Mais chaque créature a sa nature propre, et la tient de la manière spéciale dont elle participe à la ressemblance de l'essence divine. Ainsi, quand Dieu connaît sa propre essence comme susceptible d'imitation en telle forme particulière par telle créature, il la connaît comme propre notion, exemplaire ou Idée de cette créature, et ainsi des autres. "

 

Id., I, q. 84, a. 2, sol. 3 :

 

"  [...] l'essence de Dieu est la ressemblance parfaite de toutes choses, par rapport à tout ce qu'on peut trouver dans les réalités : car il est leur principe universel. "

 

Id., Contra Gentiles, IV, 13, ad Considerandum :

 

"  [...] Les choses créées par Dieu doivent donc avoir préexisté dans le Verbe de toute éternité, de manière immatérielle, sans aucune composition et de telle sorte qu'elles ne fussent rien d'autre dans le Verbe que le Verbe lui-même, qui est la vie. Voilà qui explique la parole de S. Jean : 'Ce qui a été fait, était vie en lui', c'est-à-dire dans le Verbe' (S. Jean, 1 : 3, 4). "

 

Id., Somme théologique, I, q. 57, a. 1 :

 

" [...] 'en Dieu, qui est au sommet de toutes choses, tout préexiste d'une manière supersubstantielle, en l'absolue simplicité de son être' (S. Denys, Des Divins Noms). "

 

8) Id., Somme théologique, I, q. 15, a. 1, sol. 3 :

 

"  [...] l'Idée, en Dieu, n'est pas autre chose que son essence même. "

 

Id., De Potentia, q. 3, a. 16, sol. 24 :

 

" La créature en Dieu, c'est l'essence divine elle-même. "

 

Jérémie, 1 : 5 :

 

 " Avant de te former dans le sein maternel, je t'ai connu. " [" Je t'ai connu ", toi, et non un autre.)

 

9) S. Thomas d'Aquin, dans son " De Veritate ", appelle l'être des archétypes éternels ou des formes pures un être potentiel, mais cependant " plus élevé [...] que l'être actuel des choses en elles-mêmes, puisque la puissance active est plus parfaite que l'acte qui en résulte. "

 

S. Denys l'Aréopagite, Œuvres de Saint Denys l'Aréopagite, ouv. cité plus haut, Des Noms divins, chap. V, pp. 221-222 :

 

"  [...] Car, de même que la qualification de bonté, appliquée à Dieu, exprime toutes les productions émanées de cette cause universelle, et comprend tout ce qui est ou existant, ou possible, et s'étend même par delà ; ainsi la dénomination d'être s'étend à tous les êtres et par delà [...] ".

 

10) Éphésiens, 4 : 13 ; 1 : 4 ; Sœur Elisabeth de la Trinité (1880 - 1906), carmélite, sa dernière retraite de « Laudem Gloriae » du 16 août 1906 et « Le ciel sur la terre » et ses derniers conseils de vie intérieure adressés à une ami d’enfance le 11 septembre 1906, quelques semaines avant sa mort (9 nov. 1906).

 

Cf. Jean-Pierre de Caussade, L'Abandon à la Providence divine, chap. IV.

 

S. Denys l'Aréopagite, Œuvres de Saint Denys l'Aréopagite, ouv. cité plus haut, Des Noms divins, chap. IV, § XI, p. 198.

 

I Timothée, 6 : 14-16 : S. Paul :

 

« [...] garde le commandement sans tache et sans reproche, jusqu'à l'Apparition de notre Seigneur Jésus Christ, que fera paraître aux temps marqués le Bienheureux et unique Souverain, le Roi des rois et Seigneur des seigneurs, le seul qui possède l'Immortalité, qui habite une lumière inaccessible, que nul d'entre les hommes n'a vu ni ne peut voir. A Lui appartiennent Honneur et Puissance à jamais ! Amen. »

 

Le bienheureux Ruysbroek l'Admirable, le solitaire de Groenendael, "Noces spirituelles" :

 

 "Je demande ici au lecteur toute son attention [...] C'est pourquoi notre esprit, selon la profondeur la plus intime et la plus élevée, reçoit incessamment dans sa nature nue l'impression et la lumière divine de son exemplaire éternel. Il est le temple perpétuel de Dieu, et Dieu, qui occupe toujours son temple, y arrive continuellement. Il le visite dans tous les moments par l'irradiation d'une splendeur nouvelle qu'Il y jette. Quand Dieu arrive, c'est que déjà Il était présent; là où Il est, c'est là qu'Il arrive; là où Il arrive, c'est là qu'Il était; là où Il ne fut jamais, là jamais il ne vient.

"Quand Il vient en Vous, c'est que déjà vous étiez en Lui, car Il ne sort jamais de Lui-même. [...] Par la lumière de son image éternelle, qui resplendit au fond de lui-même, au sommet de son unité, l'esprit plonge et s'abîme dans l'Essence divine, où il rencontre, avec son exemplaire éternel, sa béatitude éternelle. Il n'en reste pas moins constitué dans son être créé, par la très libre volonté de la Trinité sainte, prêt à se repandre au dehors, comme toutes les créatures et avec toute sa personnalité. C'est là qu'il imite la génération du Verbe.

"L'image de la Trinité et de l'Unité subsiste vivante et ardente en lui. Son essence créée reçoit l'impression de son exemplaire éternel, comme un miroir très fidèle reproduit l'image d'un objet, et recevant toujours la lumière, renouvelle à tout instant le portrait qu'il porte en lui. L'esprit, dans l'union divine, ne s'appuie ni sur lui-même ni sur aucune vertu propre, mais demeure en Dieu, dépend de Dieu et se rapporte à Dieu comme à sa Cause éternelle.

"Si le lecteur a bien compris ce qui précède, il pourra facilement s'élever plus haut."

 

S. Thomas d'Aquin, Contra Gentiles, liv. 4e, chap. XXXV :

 

La nature divine [du Christ] dépasse à l'infini [sa] nature humaine, la puissance de Dieu, on l'a vu, étant infinie. Il ne peut donc y avoir d'aucune façon mélange des deux natures. " [Et c'est la raison pour laquelle notre essence doit être dépassée pour que l'unité de l'essence divine soit réaliséé, car il n'est pas possible de contempler l'essence divine par quoi que ce soit de limité, mais uniquement par la lumière de gloire, lumière qui découle directement de Dieu.]

 

11) Aristote, Métaphysique, livre Thêta, chap. 8, 1049 b 20-25 et b 5 :

 

" [...] à un tel homme déterminé, qui est déjà en acte [...] sont respectivement antérieures selon le temps [...] la semence [...] mais à ces puissances elles-mêmes [la semence] sont antérieurs selon le temps d'autres êtres en acte dont elles procèdent, car d'un être en puissance un être en acte est toujours engendré par un autre être en acte : ainsi l'homme est actualisé par l'homme (1) [...] il y a toujours un moteur premier et le moteur existe déjà en acte. [...] un acte est toujours préexistant à un autre acte, jusqu'à ce qu'on arrive à l'acte du premier Moteur éternel."

  1. N'oublions pas d'ajouter une nouvelle fois : "et par la femme", ce qui fait deux êtres humains en entéléchie, et ce indéfiniment, et encore à condition qu'ils aient toujours existé - ce qui d'ailleurs ne résout rien, le rôle capital de la causalité finale, la cause des causes, étant ici totalement négligé ou relégué à un second plan, ce qui est tout à fait surprenant de la part d'Aristote, qui parle pourtant bien de premier Moteur éternel.

 

Id., liv. Lambda, chap. 7, 1073 a :

 

" La semence, en effet, provient d'autres individus qui sont antérieurs et parfaits, et ce qui est premier, ce n'est pas la semence, mais l'être parfait : par exemple, on peut dire qu'antérieurement à la semence il y a un homme, non pas l'homme provenant de la semence, mais un autre, duquel la semence provient. " [Aristote s'égare en soutenant que l'homme qui provient de la semence, ou plus exactement de la conjugaison de l'ovule avec le spermatozoïde, est un être parfait. Dans l'état déchu, aucune substance n'atteint sa perfection ou ne réalise parfaitement son essentialité ou sa forme pure. Mais cela est une des conséquences du péché d'Adam que nous révèle l'Ecriture et qui dépassait par conséquent la compréhension rationnelle du Philosophe.]

 

Id., liv. Nu, chap. 5, 1092 a 15-17 :

 

" ... car, même en ce qui concerne la génération des animaux et des plantes, les principes dont ils viennent sont parfaits : l'homme engendre l'homme, et ce n'est pas la semence qui est première. " [En réalité, ce sont l'homme et la femme qui engendrent l'homme selon la chair.]

 

           Il est impossible de parvenir ainsi à un premier homme pour justifier l'existence d'un homme déterminé, car une régression à l'infini est impensable. L'acte premier d'exister, dont toutes les choses participent, est le seul point que la pensée puisse reconnaître comme un terme dernier et d'où tout devient intelligible. Et c'est pourquoi toute science qui se limite à un aspect particulier de l'être ne parviendra jamais à l'intelligibilité totale du concret. Seule la Métaphysique, Science suprême, permet d'y parvenir.

 

Il convient cependant de signaler qu'Aristote, en démontrant que l'intellect (possible et agent), la partie principale ou fondamentale de l'homme (a), est impassible et sans mélange, incorporel et séparé de la matière (b), que seul il vient du dehors et que seul il est divin (c), que cela seul est immortel et éternel (d) et qu'il est dans le corps et constitue par conséquent une partie de l'âme, la substance formelle ou l'entéléchie première d'un corps naturel organisé (e), a réuni tous les principes nécessaires pour conclure à la non préexistence (f) et à l'éternité " postérieure " (a parte post) ou à l'éviternité de l'intellect après la corruption du corps et à la création de l'âme dans le temps par le Premier moteur séparé absolument immobile, qui est Dieu.

  1. Cf. De l'Ame, II, 2, 414 a 12-14; Éthique à Nicomaque, X, 7, 1178 a 1-8.
  2. Cf. De l'Ame, III, 4 et 5.
  3. Cf. De la Génération des Animaux, II, 3, 736 b 27; Éthique à Nicomaque, X, 7, 1177 b 27-31.
  4. Cf. Métaphysique, XII, 3, 1070 a 21-27; De l'Ame, III, 5, 430 a 23; Éthique à Nicomaque, X, 7, 1177 b 33-34.
  5. Cf. De l'Ame, II, 1, 412 a 21.
  6. Cf. Métaphysique, XII, 3, 1070 a 22-26.

 

12) Cf. Traité de l'Amour de Dieu, éd. Gallimard, Paris, 1967, liv. I, chap. I, p. 353, chap. IX, p. 378, liv. VI, chap. IV, p. 618, liv. VII, chap. I, p. 666, chap. V, p. 679 (divin saint Denis Aréopagite), chap. VII, p. 685, liv. VIII, chap. IV (apôtre de la France), liv. X, chap. XV, p. 857 (grand disciple de saint Paul), chap. XVII, p. 866.

S. Luc, 17 : 21 :

"  [...] le règne de Dieu ne vient pas de manière à frapper le regard [...] Car voici que le règne de Dieu est en vous. "

I Timothée, 6 : 14-16 :

"  [...] garde le commandement sans tache et sans reproche, jusqu'à l'Apparition de notre Seigneur Jésus Christ, que fera paraître aux temps marqués le Bienheureux et unique Souverain, le Roi des rois et Seigneurs des seigneurs, le seul qui possède l'Immortalité, qui habite une lumière inaccessible, que nul d'entre les hommes n'a vu ni ne peut voir. A Lui appartiennent Honneur et Puissance à jamais ! Amen. "

S. Marc, 16 : 12 :

"  Après cela, Jésus apparut sous une autre forme (a) à deux d'entre eux [de ceux qui avaient été avec Jésus] qui faisaient " route pour aller à la campagne. "

a) " sous une autre forme ", du lat. : in alia effigie, ou du gr. : en etera morfh.

 

13) S. François de Sales, Œuvres, ouv. cité plus haut, Traité de l'Amour de Dieu, liv. X, chap. XVI.

 

14) S. Thomas d'Aquin, Somme théologique, I, q. 15, a. 1, dif. 1 :

 

" Denys affirme que Dieu ne connaît pas les choses au moyen d'idées (a). Or, on ne suppose des Idées en Dieu qu'en vue de la connaissance des choses : il n'y a donc pas lieu de retenir cette théorie inutile. "

  1. Cf. S. Denys l'Aréopagite, Œuvres de Saint Denys l'Aréopagite, ouv. cité plus haut, Des Noms Divins, chap. 7.

 

Id., sol. 1, en réponse à dif. 1 de la q. 15, a. 1, ci-dessus :

 

Il est certain que Dieu ne conçoit pas les choses au moyen d'une idée existant hors de lui-même. Déjà Aristote reprenait, à cet égard, la doctrine de Platon, qui imaginait des Idées existantes par elles-mêmes, au lieu d'en faire un attribut de l'intellect (a). "

  1. Cf. Aristote, Métaphysique, liv. Alpha, chap. 9.

 

Mgr Darboy, Œuvres de saint Denys, ouv. cité plus haut, Introduction, page CXLIV :

 

" Là devait naturellement intervenir le nom de saint Denys. Sa théorie sur les idées archétypes, principes absolus ou participations qui forment l'essence et déterminent l'individuation des êtres, comme l'individuation des êtres, comme on disait, le range droit parmi les réalistes. "

 

S. Thomas d'Aquin, De unitate intellectus, chap. 5, § 99, trad. par Alain de Libera in Thomas d'Aquin - Contre Averroès, GF-Flammarion, Paris, 1994, p. 177 :

 

" Les substances séparées et singulières sont donc individuées, toutefois elles ne sont pas individuées à cause de la matière, mais, précisément, parce qu'elles ne sont pas faites pour être en autre chose [cas de toute substance en tant que telle, une et indivisible : esse non in alio], ni non plus, par conséquent, pour être participées par plusieurs. "

 

15) S. Denys Aréopagite, Œuvres de Saint Denys l'Aréopagite, ouv. cité plus haut, Des Noms divins, chap. 5 :

 

" Or, nous nommons types ou exemplaires les raisons créatrices des choses, et qui préexistent dans la simplicité de l'essence divine. "

 

16) Cf. S. Thomas d'Aquin, Somme théologique, I, q. 47, a. 1, c.

 

S. Denys Aréopagite, Œuvres de Saint Denys l'Aréopagite, ouv. cité plus haut, Des Noms Divins, chap. II :

 

" Forme suprême et originale, elle [la Divinité du Seigneur Jésus] donne une forme à ce qui n'en a pas ; et dans ce qui a une forme, elle en semble dépourvue, précisément à cause de l'excellence de la sienne propre. " - Id., chap. IV : " III. Or, si la bonté suprême l'emporte sur toutes choses, comme on n'en peut douter, alors, quoique sans forme, elle donne la forme à ce qui ne l'a pas. " - Id., chap. V : "  [...] ainsi il a toute forme, toute beauté, et il est sans forme, sans beauté ; car il possède par anticipation, d'une manière transcendante et incompréhensible, le principe, le milieu et la fin de tout ce qui est ; et, en vertu de sa causalité une et simple, il répand sur l'univers entier le pur rayon de l'être. "

 

17) S. Jean, 14 : 15-17 :

 

" Si vous m'aimez, vous garderez mes commandements. Et moi je prierai le Père, et il vous donnera un autre Paraclet, pour qu'il soit avec vous pour toujours, l'Esprit de vérité, que le monde ne peut accueillir, parce qu'il ne le voit ni ne le connaît : mais vous, vous le connaissez, parce qu'il demeure en vous, et qu'il sera en vous. "

 

Id., verset 23 :

 

«  Si quelqu'un m'aime, il gardera ma parole, et mon Père l'aimera, et nous viendrons à lui, et nous ferons notre demeure chez lui. »

 

I Corinthiens, 3 : 16 :

 

"  Ne savez-vous pas que vous êtes un temple de Dieu, et que l'Esprit de Dieu habite en vous ? "

 

Sainte Thérèse d'Avila (1515-1582), Docteur de l'Église (1970), Œuvres complètes, ouv. cité plus haut, Château de l'âme, Cinquièmes Demeures, chap. III :

 

"  [...] Car la véritable union à la volonté de Dieu peut très bien s'obtenir, avec l'aide de Notre-Seigneur, quand nous nous efforçons dans ce but de n'avoir plus de volonté propre et de nous attacher à tout ce qui est exigé par la volonté de Dieu. [...] Or, je vous l'assure et je ne cesserai de le répéter, si vous êtes dans ces dispositions, vous avez obtenu de Notre-Seigneur la grâce de l'union ; ne vous préoccupez plus de cette autre faveur pleine de délices dont j'ai parlé ; car ce qu'il y a de plus précieux dans celle-ci, c'est qu'elle procède de celle dont je traite en ce moment. [...] Telle est l'union que j'ai désirée toute ma vie et que je ne cesse de demander à Notre-Seigneur ; c'est, en outre celle qui est la plus facile à reconnaître et la plus sûre. [...] Il n'est pas nécessaire que Dieu nous accorde de grandes délices pour nous élever à cet état ; il suffit qu'il nous ait donné son Fils pour nous montrer le chemin. [...] Dans le cas présent, Dieu ne demande de nous que deux choses : que nous l'aimions, et que nous aimions notre prochain. [...] La marque la plus sûre, à mon avis, pour savoir si nous avons ce double amour, consiste à aimer véritablement le prochain ; car nous ne pouvons pas avoir la certitude que nous aimons Dieu, bien que nous en ayons des indices très sérieux ; mais nous pouvons savoir sûrement si nous aimons le prochain. Soyez certaines que plus vous découvrirez en vous de progrès dans l'amour du prochain, plus vous serez avancées dans l'amour de Dieu. "

 

S. Luc, 17 : 21 :

 

"  [...] le règne de Dieu ne vient pas de manière à frapper le regard [...] Car voici que le règne de Dieu est en vous. "

I Timothée, 6 : 14-16 : "  [...] garde le commandement sans tache et sans reproche, jusqu'à l'Apparition de notre Seigneur Jésus Christ, que fera paraître aux temps marqués le Bienheureux et unique Souverain, le Roi des rois et Seigneurs des seigneurs, le seul qui possède l'Immortalité, qui habite une lumière inaccessible, que nul d'entre les hommes n'a vu ni ne peut voir. À Lui appartiennent Honneur et Puissance à jamais ! Amen. " - S. Marc, 16 : 12 : "  Après cela, Jésus apparut sous une autre forme (a) à deux d'entre eux [de ceux qui avaient été avec Jésus] qui faisaient " route pour aller à la campagne. "

  1. " sous une autre forme ", du lat. : in alia effigie, ou du gr. : en etera morfh.

 

I Corinthiens, 8 : 6 : "  [...] pour nous [chrétiens] en tout cas, il n'y a qu'un seul Dieu, le Père, de qui tout vient et pour qui nous sommes faits, et un seul Seigneur, Jésus Christ, par qui tout existe et par qui nous sommes. "

 

S. Augustin, De la vraie religion, I, 39 :

 

" Ne va point au-dehors, rentre en toi-même ; dans l'homme intérieur habite la Vérité. "

 

 

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