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23 novembre 2012 5 23 /11 /novembre /2012 14:56

 

 

30. Cependant ceux qui se sont déjà attachés à la vertu ne doivent pas rechercher ces larmes qui coulent avec tant de peine et qui viennent seulement de l'homme extérieur ; car, lors même qu'ils réussiraient à les répandre, elles n'ont aucun rapport avec cette abondance de larmes que Dieu donne tout à coup. Ces efforts ne font que distraire et abattre l'âme qui prie ; elle ne peut s'élever à cette contemplation de Dieu, qui la fixerait en sa présence, et elle retombe sur elle-même, pour n'obtenir que quelques pauvres larmes stériles.

31. Pour vous faire comprendre la véritable prière, je ne vous parlerai pas moi-même ; je laisserai parler le bienheureux Antoine, que nous avons vu souvent si absorbé dans la prière, que le soleil le surprenait dans son extase, et nous l'avons entendu s'écrier : « Ô soleil, pourquoi m'arrêter ? Tu ne te lèves que pour m'ôter la clarté de la lumière véritable. »

 Ce saint homme disait de la prière cette parole surhumaine et céleste : « Il n'y a pas de prière parfaite si le religieux s'aperçoit lui-même qu'il prie. » Nous oserons, malgré notre faiblesse, ajouter quelque chose à cette parole admirable, et nous indiquerons, d'après notre expérience, les moyens de reconnaître que Dieu nous a exaucés.

32. Si, quand nous prions, nous ne ressentons aucune hésitation, aucun doute, si nous croyons sentir que nous sommes exaucés, soyons persuadés que nos prières ont réussi auprès de Dieu. Plus nous croirons que Dieu nous regarde et nous écoute, plus nous mériterons d'obtenir ce que nous demandons ; car Notre-Seigneur est fidèle dans ses promesses, et il a dit : « Tout ce que vous demanderez dans votre prière, croyez que vous le recevrez, et vous l'obtiendrez. » (S. Marc, XI, 24.) 

33. L'ABBÉ GERMAIN. Cette persuasion qu'on sera exaucé ne peut venir que d'une grande pureté de conscience ; mais nous qui avons encore le cœur déchiré par les épines du péché, pouvons-nous espérer que Dieu écoutera nos prières, lorsque nous n'avons, pour les appuyer, aucun mérite ?

34. L'ABBÉ ISAAC. L'Évangile et les prophètes nous apprennent les différentes causes qui font exaucer nos prières, selon les différentes dispositions de l'âme. Vous avez un moyen d'être exaucés, en vous réunissant pour prier, selon cette parole du Sauveur : « Si deux d'entre vous s'unissent sur la terre, tout ce qu'ils demanderont, mon Père qui est au ciel le leur accordera. » (S. Matth., XVIII, 19.) Vous avez un autre moyen, dans la plénitude de la foi, qui est comparée au grain de sénevé : « Si vous avez, est-il dit, de la foi comme un grain de sénevé, vous direz à cette montagne : Allez là, et elle ira, et rien ne vous sera impossible. » (S. Matth., XVII, 19.) Vous en avez un autre dans la persévérance de votre prière, qui doit aller, selon Notre-Seigneur, jusqu'à l'importunité : « En vérité, en vérité, je vous le dis, si ce n'est pas par affection, ce sera à cause de son importunité, qu'il se lèvera et lui donnera ce dont il aura besoin. » (S. Luc, XI, 8.) Vous avez le moyen de l'aumône: « Renfermez votre aumône dans le cœur du pauvre, et elle priera pour vous au jour de la tribulation. » (Eccli., XXIX, 15.) Le changement de vie et les œuvres de miséricorde vous feront aussi exaucer : « Brisez les chaînes de l'impiété ; ôtez les fardeaux qui accablent » (Isaïe, LVIII, 6)  ; et le Prophète ajoute, après avoir parlé de la stérilité d'un jeûne inutile : « Alors vous invoquerez le Seigneur, et le Seigneur vous exaucera ; vous crierez, et il dira : Me voici.» (Ibid., 9.) Quelquefois l'excès de la tribulation vous fera exaucer : « J'ai crié vers le Seigneur, lorsque j'étais dans l'affliction, et il m'a exaucé » (Ps. CXIX,1)  ; et encore : « N'affligez pas l'étranger, car s'il crie vers moi, je l'exaucerai parce que je suis plein de miséricorde. » (Exod., XXII, 27.)

Vous voyez qu'il y a beaucoup de manières de mériter la grâce d'être exaucé, et personne ne doit désespérer d'obtenir les biens véritables et éternels. Car si la vue de nos misères nous persuade que nous ne sommes pas dans les conditions dont nous venons de parler, si nous ne pouvons nous unir à quelqu'un, avoir de la foi gros comme un grain de sénevé, et faire les œuvres de miséricorde qu'indique le Prophète, nous pouvons recourir à cette importunité qui est possible à tous et qui suffit pour obtenir de Dieu tout ce que nous lui demandons. Il faut donc persévérer dans la prière, sans hésitation, avec une pleine confiance, et ne jamais douter que nous n'obtenions tout ce qui sera conforme au bon plaisir de Dieu. Car Dieu lui-même, dans son désir de nous accorder les biens célestes et éternels, nous exhorte à lui faire violence par nos importunités, qu'il ne méprise pas, qu'il ne repousse pas, mais qu'il loue, au contraire, et qu'il réclame, promettant d'écouter avec bonté ceux qui espèrent avec persévérance : « Demandez, et vous recevrez ; cherchez, et vous trouverez  ; frappez, et il vous sera ouvert ; car celui qui demande reçoit, celui qui cherche trouve, et il est ouvert à celui qui frappe » (S. Luc, XI, 9) ; et encore : « Tout ce que vous demanderez dans la prière avec confiance, vous le recevrez, et rien ne vous sera impossible. » (S. Matth., XXI, 22.)

Si donc toutes les autres choses qui pourraient nous faire exaucer nous manquent, usons du moins de celte importunité qui ne demande pas de mérite et de grands efforts, et qui dépend seulement de la volonté. Mais il est certain que celui qui doute d'être exaucé ne sera pas exaucé. Prions donc sans jamais nous lasser, à l'exemple du prophète Daniel, qui fut écouté de Dieu dès le premier jour, et qui n'obtint ce qu'il demandait que vingt et un jours après. (Daniel, X, 13.) Nous ne devons donc pas cesser de prier avec ferveur, quoique Dieu paraisse être lent à nous exaucer. Ces retards peuvent être une disposition de la Providence, ou l'ange que Dieu avait chargé de nous apporter ses grâces, a rencontré la résistance du démon, et il ne peut accomplir son message, s'il nous trouve refroidis dans notre prière (1). C'est ce qui serait arrivé certainement au Prophète, si sa vertu incomparable ne l'avait pas fait persévérer dans ses prières pendant vingt et un jours.

Ne nous laissons pas aller au découragement, lorsque nous sentons que notre prière n'est pas exaucée, et ne doutons pas de la promesse de Dieu qui a dit : « Tout ce que vous demanderez avec confiance dans la prière, vous le recevrez. » (S. Matth., XXI, 22.) Il ne faut pas rejeter cette parole de l'évangéliste saint Jean, qui tranche toute difficulté à ce sujet : « Voici la confiance que nous avons en Dieu : tout ce que nous lui demanderons de conforme à sa volonté, nous l'obtiendrons. » (S. Jean, V, 14.)

Il veut donc que nous n'ayons une entière confiance dans nos prières, que quand elles ont pour règle sa volonté et non pas notre bien-être et notre consolation temporelle. C'est ce que nous disons nous-mêmes dans (1) La résistance du démon ne peut arrêter l'action des bons anges auprès de nous que par notre complicité. L'Oraison dominicale : « Que votre volonté soit faite et non la nôtre. » Si nous nous rappelons ce que dit l'Apôtre : « Nous ne savons ce qu'il faut demander et comment il faut demander », nous comprendrons que souvent nous demandons des choses contraires à notre salut, et que Dieu, qui voit bien mieux que nous ce qui nous est utile, nous fait une grande grâce en nous les refusant. Il en fut certainement ainsi pour l'Apôtre des nations, qui demandait d'être délivré de cet ange de Satan, auquel Dieu permettait, pour son bien, de l'insulter : « Par trois fois, dit-il, j'ai demandé au Seigneur de l'éloigner de moi, il m'a été répondu : Ma grâce te suffit ; car la vertu se perfectionne dans la faiblesse. » (I Cor., XII, 9.) Notre-Seigneur, revêtu de notre humanité, a voulu nous donner en cela l'exemple, comme il l'avait fait pour le reste. Il disait dans sa prière : « Mon Père, s'il est possible, que ce calice s'éloigne de moi ; cependant qu'il soit fait, non pas selon ma volonté, mais selon la vôtre (S. Matth., XXVl, 39)  ; et ainsi sa volonté ne différait en rien de la volonté de son Père, « car il était venu sauver ce qui avait péri (S. Matth., XVIII, 11) et donner sa vie pour la rédemption d'un grand nombre. » (S. Matth., XX, 18.) Il avait dit lui-même : « Personne ne m'ôte la vie, c'est moi qui la quitte volontairement ; j'ai le pouvoir de la quitter, et j'ai aussi le pouvoir de la reprendre. » (S. Jean, X, 17.)

David exprime cette union intime des volontés du Fils et du Père : « C'est votre volonté, mon Dieu, que j'ai voulu faire.» (Ps. XXXIX, 9.) Il est dit du Père : « Dieu a tellement aimé le monde, qu'il lui a donné son Fils unique » (S. Jean, III, 16)  ; et il est écrit du Fils : « Il s'est livré lui-même pour nos péchés. » (Galat., I, 4.) Il est encore dit du Père : « Il n'a pas épargné son propre Fils, mais il l'a livré pour nous » (Rom., VII, 32), et du Fils : « Il s'est offert parce qu'il l'a voulu. » (Isaïe, LIII, 7.) La volonté du Père et du Fils est donc en toute chose la même, et les deux volontés se sont également accordées dans le mystère de la Résurrection  ; car l'Apôtre dit que le Père a ressuscité le corps de Jésus Christ, » et c'est Dieu le Père qui a ressuscité son Fils d'entre les morts» (Gal., I, 1)  ; et le Fils a déclaré qu'il relèverait le temple de son corps : « Détruisez le temple, a-t-il dit, et je le rétablirai en trois jours. » (S. Jean, II, 19.)

Suivons donc l'exemple de Notre-Seigneur et terminons toutes nos prières en disant : « Cependant, qu'il soit fait, non pas selon ma volonté, mais selon la vôtre.» C'est ce que rappellent les trois inclinations que font les religieux, en achevant ensemble leurs prières. Celui qui n'y pense pas ne saurait en comprendre le sens.

35. Un des préceptes évangéliques qu'il faut observer avec le plus de soin, « c'est, avant tout, d'entrer dans sa chambre, de fermer sa porte pour prier notre Père en secret. » (S. Matth., VI, 6.) Voici le moyen d'accomplir ce commandement : Nous prions dans notre chambre, lorsque nous bannissons de notre cœur le bruit de nos pensées et de nos inquiétudes, pour offrir à Dieu nos prières dans le secret de l'amour. Nous fermons notre porte, lorsque nous fermons nos lèvres, pour prier en silence Celui qui écoute le cœur plus que les paroles. Nous prions en secret, lorsque nous exposons à Dieu nos demandes, de tout notre cœur, de toute notre âme, sans que notre ennemi puisse même reconnaître ce que nous lui demandons ; car nous devons prier en silence, non seulement pour ne pas distraire nos frères présents, par nos soupirs et nos cris, et les empêcher eux-mêmes de prier, mais encore pour cacher nos intentions aux démons, qui nous attaquent surtout pendant la prière. C'est ainsi que nous accomplirons ce précepte : « Fermez votre bouche, et gardez-vous de celle qui dort sur votre sein. » (Michée, VII, 5.)

36. Ainsi nous devons faire des prières courtes, mais fréquentes, de peur que, si elles étaient longues, l'ennemi n'eût le temps de jeter quelques distractions dans notre cœur. C'est là le vrai sacrifice : « Un cœur contrit est le sacrifice agréable à Dieu » (Ps. L, 19)  ; c'est l'oblation salutaire, l'offrande pure, le sacrifice de justice et de louange, l'hostie véritable et grasse, la moelle de l'holocauste (Ps. LXV,15), qu'offre un cœur contrit et humilié. Si nous prions avec cette ferveur et cette disposition d'esprit, nous pourrons bien dire avec David : « Que ma prière monte en votre présence, comme l'encens, et que mes mains s'élèvent comme le sacrifice du soir. » (Ps. CXL, 2.) C'est le sacrifice que l'heure et l'approche de la nuit nous invitent à offrir. Il semble à notre faiblesse que nous avons parlé longtemps et dit beaucoup de choses, et cependant c'est bien peu, si nous considérons la grandeur et la difficulté du sujet.

Les saintes instructions du vénérable abbé nous ravirent sans nous rassasier. Après avoir célébré les vêpres et pris quelque repos, nous le conjurâmes, dès que parut le jour, de traiter plus complètement encore le même sujet. Nous prîmes ensuite congé de lui, tout joyeux de ce qu'il nous avait dit, et de ce qu'il avait promis de nous dire. Il nous avait bien démontré l'excellence de la prière, mais il ne nous avait pas assez expliqué l'ordre et les dispositions nécessaires pour acquérir et conserver la persévérance dans la prière.

  

 

Moyens d'arriver à la perfection de la prière. — Pureté de Pâme. — Se séparer des choses matérielles et sensibles. — S'unir à Jésus–Christ. — Commencer par les choses les plus faciles. — Beauté de ce verset : Mon Dieu, venez à mon aide ; Seigneur, hâtez-vous de me secourir. — Préparation par la pauvreté d'esprit, les veilles, la méditation, le travail des mains.

 

1. Je suis obligé de rapporter ici une chose qui semble faire tache clans la vie si sublime des solitaires, que je me suis efforcé, avec la grâce de Dieu, d'exposer ailleurs du mieux qu'il m'a été possible (1). Je n'hésite pas à le faire dans l'espoir qu'il en sortira un grand enseignement pour les personnes simples qui liront le passage de la Genèse où il est question de l'image et ressemblance divine. (Gen., I, 11.) L'intelligence de ce texte est nécessaire pour ne pas tomber dans un grossier blasphème, et pour ne pas nier le fondement même de la foi catholique.

(1) Dans le livre des Institutions, autre ouvrage de Cassien.

2. En Égypte, il existe une ancienne coutume ; après l'Épiphanie, que les prêtres de la province appellent la fête du baptême de Notre-Seigneur ou de sa naissance, selon la chair, car ils ne célèbrent pas séparément ces deux mystères, comme le font les Églises d'Occident, le patriarche d'Alexandrie envoie, par toute l'Égypte, des lettres qui indiquent le commencement du carême et le jour de Pâques, non seulement à toutes les villes, niais encore à tous les monastères. Il arriva donc, d'après cette coutume, que peu de jours après la conférence que nous avions eue avec l'abbé Isaac, l'évêque d'Alexandrie, Théophile, envoya des lettres publiques où, en annonçant la fête pascale, il discutait et réfutait longuement l'absurde hérésie des anthropomorphites (1). La plupart des solitaires d'Égypte, dont la simplicité avait été surprise par l'erreur, attaquèrent presque tous l'écrit du patriarche, et la plupart des anciens résolurent de se séparer de lui, comme d'un homme qui faussait la sainte Écriture, en niant que Dieu eût une forme humaine, tandis que la Genèse dit positivement qu'Adam fut créé à sa ressemblance.

 (1) Ces hérétiques attribuaient à Dieu une forme humaine, en interprétant mal quelques passages de l'Écriture.

Enfin les solitaires qui habitaient le désert de Schethé, et qui surpassaient en science et en perfection ceux qui habitaient les monastères de l'Égypte, rejetèrent tous cette lettre ; il n'y eut que l'abbé Paphnuce, prêtre de notre congrégation, qui l'accepta, et aucun des prêtres qui présidaient aux trois Églises du désert ne permit qu'on la lût ou qu'on la récitât dans leurs assemblées.

3. Parmi ces solitaires, tombés dans cette erreur, se trouvait un abbé nommé Sérapion, consommé dans toutes les vertus, et recommandable par l'austérité de sa vie. Son ignorance sur ce point de doctrine nuisait d'autant plus à ses frères, qu'il les surpassait presque tous par son mérite et son expérience. Le saint prêtre Paphnuce chercha souvent, par ses exhortations, à le ramener à la foi véritable, sans pouvoir réussir, parce que cette doctrine lui semblait une doctrine nouvelle, contraire à la tradition. Sur ces entrefaites, arriva de la Cappadoce, pour visiter les solitaires, le diacre Photin, qui était très savant. Le bienheureux Paphnuce le reçut avec une grande affection, et pour bien établir la vérité contenue dans les lettres de Théophile, il le pria d'expliquer, en présence de tous les frères, comment les Églises d'Orient interprétaient le passage de la Genèse : « Faisons l'homme à notre image et ressemblance. » Le saint diacre montra que tous les évêques de ces Églises ne prenaient pas le passage à la lettre, mais qu'ils attachaient un sens spirituel à cette image et ressemblance divine. Il prouva clairement, et par des textes nombreux de l'Écriture, qu'il était impossible d'admettre que la majesté infinie, incompréhensible et invisible de Dieu fût limitée, circonscrite par quelque chose rappelant la forme humaine, parce que sa nature était simple, immatérielle, incorporelle, et que l'œil ne pouvait pas plus la saisir que l'esprit la comprendre. Le bon vieillard, vaincu par des démonstrations si savantes, revint aux croyances de la tradition catholique.

L'abbé Paphnuce ressentit une grande joie de ce changement, et nous fûmes tous heureux de voir que Dieu n'avait pas permis qu'un homme, vieilli dans les austérités et la pratique de toutes les vertus, persévérât, par simplicité et par ignorance, dans une croyance si contraire à la foi ; et nous nous levâmes pour lui offrir de publiques actions de grâces. Pendant notre prière, le bon vieillard, confus de voir se dissiper toutes les images qu'il se formait de Dieu, s'abandonnait, en priant, aux gémissements et aux larmes, et se prosternait à terre en criant : « Hélas ! que je suis malheureux ! ils m'ont enlevé mon Dieu. Je n'ai plus rien pour me fixer  ; je ne connais plus maintenant Celui que je dois adorer et supplier. » Cet événement nous troubla, surtout en nous rappelant ce qu'il avait dit dans notre dernière conférence ; nous allâmes trouver l'abbé Isaac, et dès que nous l'aperçûmes, nous lui parlâmes en ces termes :

4. Mon Père, les choses nouvelles et intéressantes que vous nous avez dites dans votre conférence sur la prière, nous engageaient bien à tout quitter pour revenir profiter de votre expérience  ; mais nous y sommes encore portés davantage, en voyant l'erreur grossière où nous pensons que les ruses de l'ennemi ont fait tomber l'abbé Sérapion. Nous sommes vraiment consternés, en considérant que tant de travaux, tant de peines, admirablement supportés dans le désert, pendant cinquante ans, pouvaient être perdus à cause de son ignorance, et qu'il était même exposé à une mort éternelle. Nous désirons savoir, d'abord, pourquoi il est tombé dans une si grave erreur  ; et nous vous supplions de nous apprendre ensuite le. moyen d'arriver à cette prière, dont vous nous avez déjà si parfaitement entretenus. Cette admirable conférence nous a frappé l'esprit ; mais elle ne nous a pas indiqué les moyens de pratiquer ce que vous nous avez enseigné.

5. L'ABBÉ ISAAC. Il n'est pas étonnant qu'un homme fort simple, qui n'a rien appris sur la substance et la nature divine, soit resté par ignorance et par habitude dans son ancienne erreur ; car, à vous parler franchement, je ne pense pas, comme vous, qu'il ait été trompé par le démon depuis sa conversion, mais qu'il a seulement continué à suivre les données du paganisme qui adore les démons sous une forme humaine. Beaucoup croient ainsi, par habitude, qu'il faut adorer sous la forme d'une image la majesté incompréhensible et infinie de Dieu, bien persuadés qu'ils ne pourront jamais fixer leurs pensées, et bien faire leurs prières, s'ils n'ont pas toujours dans leur esprit et devant les yeux une image à laquelle ils offrent leurs supplications. C'est l'erreur que l'Apôtre condamne, en disant « Ils ont changé la gloire incorruptible de Dieu en la ressemblance de l'image de l'homme corruptible. » (Rom., I, 23.) Jérémie dit aussi : « Mon peuple a changé sa gloire en une idole. » (Jér., II, 11.)

 

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